Accès à la justice : Le CGD échange avec les populations de la Boucle du Mouhoun

Publié le samedi 30 septembre 2017 à 02h14min

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Accès à la justice : Le CGD échange avec les populations de la Boucle du Mouhoun

Depuis quelques années, la justice burkinabè est pointée, à tort ou à raison, comme la source de certaines crises socio-politiques. Si fait qu’une crise de confiance se vit aujourd’hui entre le citoyen et l’institution judiciaire. Dans son élan également de construction d’une conscience citoyenne, le Centre pour la gouvernance démocratique (CGD) a fait de la question de la justice, son cheval de bataille. Depuis quelques semaines donc, il a entamé une série d’activités publiques à travers plusieurs régions du pays sur l’accès à la justice. Après la région des Cascades, l’institution était dans la Boucle du Mouhoun, le samedi, 23 septembre 2017.

« Droit d’accès à la justice : état des lieux et mécanismes de rapprochement de la justice du justiciable ». C’est sur ce thème précis que le président du tribunal administratif de Bobo-Dioulasso, juge Karfa Gnanou (principal communicateur) et le chargé de programme du CGD, Assegna Anselme Somda ont entretenu les populations de la Boucle du Mouhoun via une conférence publique et une émission radio.

Etat des lieux et propositions pour améliorer l’accès à la justice ; ce sont-là les deux grands axes qui ont soutendu la démarche du conférencier. Puis, un zoom sur le contexte en faisant ressortir l’organisation institutionnelle du Burkina depuis juin 1991 ; période à partir de laquelle le pays a renoué avec une vie constitutionnelle. L’Etat de droit est organisé autour de trois piliers (exécutif, législatif et judicaire). Le pouvoir judiciaire est donc le fondement de l’Etat de droit et le droit d’accès à la justice, un droit fondamental.

Constitué de l’ensemble des juridictions créées par la loi (cours et tribunaux), ce pouvoir a reçu pour mission principale d’assurer la protection des droits et libertés garantis par la Constitution. « La justice est donc la protectrice des droits et libertés individuels », soutient le défenseur de droits de l’homme, Karfa Gnanou.
Mais pour que cette protection soit assurée, il faut avoir accès à l’institution. C’est-à-dire à la justice, être à même de saisir le juge.

L’accès à la justice doit être appréhendé à travers trois éléments : la distance qu’a à parcourir un citoyen pour trouver un service de justice (critère géographique ou physique), le coût (accessibilité financière) et enfin, la perception du justiciable, sa confiance vis-à-vis de la justice (critère psychologique).

L’état des lieux a donc consisté à passer en revue ces trois éléments (critères). Au passage, on note qu’à ce jour, le Burkina compte 25 Tribunaux de grande instance (TGI), 25 Tribunaux administratifs (TA), des Tribunaux administratifs/Tribunaux d’arrondissement (TD/TA) dans tous les départements et arrondissements. De cette présentation du maillage des tribunaux, il ressort qu’avec l’ouverture du TGI de Koupèla, en novembre 2016, le rayon moyen (distance moyenne à parcourir) pour avoir accès à un tribunal est de 50 kilomètres.

Le principe est que la justice est « gratuite ». Cela implique qu’en dehors des frais de dossiers, les personnes à l’intérieur de la justice, c’est-à-dire les agents publics ne sont pas payés. En clair, le justiciable n’a pas de frais à débourser pour avoir accès au juge qui doit connaître de son affaire à la justice. Il est à ne pas confondre avec les acteurs des professions libérales dont l’assistance engage des frais à celui qui sollicite le service (avocat, huissier, notaire).

C’est pourquoi, pour donner une chance à tous, depuis 1999, une loi prévoit l’assistance judiciaire aux personnes aux conditions modestes (mais l’opérationnalisation dudit fonds a véritablement eu lieu à partir de 2015). Cette assistance permet aux bénéficiaires de s’attacher les services de la justice.

En ce qui concerne la condition psychologique, elle dépend de plusieurs facteurs dont la posture du juge, la perception du citoyen qui pense que le juge n’est pas indépendant (qu’il est sujet à corruption), la lenteur dans le fonctionnement de la justice, le décalage entre lois et réalités, etc.

De ses analyses de la situation sur la base des critères sus-évoqués, le conférencier est parvenu à la conclusion que des efforts sont certes consentis à chaque niveau, mais des insuffisances demeurent.

D’où la nécessité de travailler pour améliorer cet accès à la justice.
Ainsi, sur l’accessibilité géographique, le conférencier a fait plusieurs recommandations parmi lesquelles, la poursuite (dans une certaine rationalité) de l’ouverture des TGI, des TA et des juridictions qui connaissent des affaires au premier niveau, la création d’une Cour d’appel dans le chef-lieu de la région (Dédougou), le renforcement des ressources humaines en misant sur les recrutements. Tout en encourageant les justiciables à s’adresser au Fonds d’assistance judiciaires, le président du TA de Bobo-Dioulasso a souhaité que cette assistance soit renforcée.

A la suite de la communication, les participants, venus de plusieurs horizons, n’ont été avares en réactions. Tant en commentaires sur des points abordés, en contributions qu’en questions d’éclaircissement. De cette partie, on retient entre autres que le ‘’piétinement’’ de certains dossiers (Thomas Sankara, Norbert Zongo, Putsch de septembre 2015, etc.) n’est pas de nature à instaurer la confiance entre l’institution judicaire et le justiciable. Certains voient en cette situation de ‘’stagnation’’, un croisement entre le politique et l’homme de droit au détriment de la manifestation de la justice. C’est pourquoi pensent-ils qu’il faut impérativement liquider les dossiers pendants, condition pour (ré) instaurer la confiance entre le citoyen et la justice.
En outre, des intervenants ont souhaité que la justice communique de plus en plus avec les populations, notamment par ce type d’activités (conférences publiques), des journées portes ouvertes sur la justice, etc.

Lire aussi :Accès à la justice : « Juge égal serviteur de la loi. Donc, si la loi n’est pas bonne, la décision ne peut être en faveur des populations », magistrat Karfa Gnanou

O.O
Lefaso.net

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