Agriculture dans la Boucle du Mouhoun : L’ONG SOS Faim Luxembourg à la recherche de solutions pour un accès facile et la réussite du Warrantage

Publié le mercredi 4 décembre 2019 à 22h33min

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Agriculture dans la Boucle du Mouhoun : L’ONG SOS Faim Luxembourg à la recherche de solutions pour un accès facile et la réussite du Warrantage

La Chambre Régionale d’Agriculture en collaboration avec l’ONG SOS Faim Luxembourg a organisé, les 3 et 4 décembre 2019 à Dédougou, dans la région de la Boucle du Mouhoun, la deuxième session de l’Espace Régional de Dialogue et d’Action sur le financement agricole. Placé sous le thème : « Comment faciliter l’accès et réussir le warrantage ? », cet espace régional de dialogue et d’action se veut un cadre de partage d’expériences entre les acteurs concernés par la question du financement agricole pour « Apprendre ensemble et Agir ensemble ». La présente session consacrée au warrantage qui apparait aujourd’hui comme une des alternatives contribuant à la résolution des problèmes d’insuffisance des garanties au niveau des producteurs agricoles. Il vise à susciter des échanges sur les difficultés et préoccupations communes liées à la mise en œuvre du warrantage, à proposer des stratégies et des actions communes pour faciliter et réussir le warrantage.

SOS Faim Luxembourg est une ONG de développement durable qui lutte contre la faim et la pauvreté en milieu rural en Afrique, à travers son dispositif Agri+. Ce programme est une initiative visant à répondre au manque d’accès au financement des exploitations familiales, qui représentent toujours la grande majorité des acteurs du secteur agricole en Afrique de l’Ouest. Il est financé par le ministère des Affaires étrangères et européennes du Luxembourg (MAEE), sur la période de 2016 à 2022.

Son objectif est de développer une offre qui réponde aux besoins de financement des exploitations familiales en matière d’agriculture et d’élevage. Le dispositif comporte ainsi deux outils de financement à savoir, un fonds de garantie et une ligne de crédit. Il comprend également un programme de formation-accompagnement qui a pour objectif de renforcer les compétences et le positionnement stratégique des acteurs agricoles impliqués dans le financement.

Les participants de la rencontre

Au Burkina Faso, ce programme est mis en œuvre dans les régions de la Boucle du Mouhoun, du Centre-nord et de l’Est. C’est ainsi que dans la première région d’intervention, les responsables du programme ont entrepris plusieurs actions, dont des rencontres d’échanges et de partage d’expériences, en vue d’améliorer le secteur agricole dans ladite région. En décembre 2018, cette ONG organisait ainsi sa toute première session de l’espace régional de dialogue et d’action sur le financement agricole dans la région de la Boucle du Mouhoun, pour permettre aux acteurs du financement agricole, de mieux se connaitre.

Selon la Représentante Pays de l’ONG SOS Faim Luxembourg, Alimata Sawadogo, c’est à l’issue de cet atelier que les participants avaient recommandé vivement que l’ONG puisse accompagner une dynamique d’échanges annuelles sur des thématiques qui intéressent les producteurs et plusieurs acteurs de la région.

« C’est ainsi que la Chambre régionale d’agriculture (CRA) qui porte cette dynamique dans la région, a identifié le thème du warrantage, qui est aujourd’hui le sujet de notre espace de dialogue et d’action. Le warrantage étant un mécanisme de facilitation de l’accès au financement, permettra sans nul doute, après de telle réflexion, d’échanges, de partage d’expériences réussies et non réussies, de relever les goulots d’étranglement qui existent encore et qui ne permet pas au warrantage de prendre route. L’objectif est d’apprendre ensemble pour mieux agir ensemble », a-t-elle laissé entendre.

Alimata Sawadogo, représentante pays de l’ONG SOS Faim Luxembourg

En effet, le secteur agricole constitue une composante essentielle de l’économie du Burkina Faso. Il contribue pour 35 % au Produit Intérieur Brut (PIB) du pays et emploie plus de 80% de la population active. Malgré les progrès réalisés au cours des dernières années, ce secteur agricole souffre d’une faible productivité en raison de plusieurs facteurs défavorables, dont les aléas climatiques, la faiblesse des investissements et les fortes variations des prix des denrées alimentaires. La conjugaison de tous ces facteurs constitue de véritables obstacles au développement et à la transformation du secteur rural.

Malgré le potentiel de croissance du secteur agricole, on estime à seulement 2 % le taux d’accès des populations rurales au crédit auprès des institutions financières (Finscop 2016). En effet les institutions financières hésitent toujours à prêter de l’argent aux exploitants agricoles familiaux, estimant que ces derniers ne disposent pas de garanties suffisantes alors que les risques dans le secteur sont très élevés.

La photo de famille

Face à cette situation, plusieurs expériences ont vu le jour pour favoriser l’accès des exploitants agricoles familiaux à des financements agricoles adaptés à leurs besoins et à leurs spécificités. Parmi ces expériences, le warrantage dit « communautaire » ou « paysan » s’est relevé être efficace et adapté aux besoins des populations rurales. Introduit au Burkina Faso vers la fin des années 90, il a démontré qu’il peut contribuer à augmenter la résilience face à l’insécurité alimentaire et aussi à améliorer l’accès des producteurs au crédit pour leurs besoins spécifiques à travers un crédit collectif.

Il consiste pour les producteurs agricoles à stocker une partie de leurs récoltes non périssables en les utilisant comme garantie pour accéder à un crédit collectif octroyé par une institution de financement. Dès lors et à la faveur de l’intervention de plusieurs projets/programmes et des ONG, le warrantage est devenu une réelle alternative pour les exploitants agricoles familiaux, leur permettant ainsi de contourner la difficulté de la garantie qui limite leur accès au crédit. Ainsi les initiatives ont foisonné dans la région de la Boucle du Mouhoun avec des expériences diverses. Très souvent perçu comme un système gagnant-gagnant entre producteur et institution financière, chaque acteur court quand même un risque de sortir perdant.

Nonyeza Bonzi, président de la chambre régionale d’agriculture

Pour le président de la Chambre régionale d’agriculture de la Boucle du Mouhoun, Nonyeza Bonzi, « la question centrale qui bloque souvent les agriculteurs, c’est la question de commercialisation. Le warrantage est une solution qui peut permettre aux producteurs d’améliorer leurs productions, d’avoir des ressources pour développer d’autres activités génératrices de revenu, en attendant que le marché soit propice pour écouler et faire face aux sollicitations qu’ils ont eu avec les institutions. Réussir le warrantage, c’est vraiment développer le secteur de l’agriculture dans la région de la Boucle du Mouhoun », a-t-il apprécié.

Cette rencontre se présente, selon lui, comme une bonne opportunité pour tous les acteurs d’apporter leurs expériences, pour qu’à la sortie des deux jours de réflexion, ils puissent avoir une feuille de route qui leur permettra d’être au même niveau pour le développement du secteur agricole.

Il a donc invité tous les acteurs, notamment les institutions de microfinance, les institutions financières, l’État, ainsi que les organisations paysannes qui sont la cheville ouvrière de cet atelier, à des échanges francs afin d’aboutir à des recommandations, pour une mise en œuvre efficiente du warrantage et pour l’amélioration des conditions d’accès au financement des organisations paysannes.

Gustave Sanou, directeur régional en charge de l’agriculture dans la région de la Boucle du Mouhoun

La cérémonie d’ouverture des travaux a été présidée par le directeur régionale de l’agriculture et des aménagements hydro-agricoles de la région de la Boucle du Mouhoun, Gustave Sanou. Ce dernier a apprécié la tenue de cette rencontre dans la région de la Boucle du Mouhoun. « Ce sont des opportunités à saisir étant donné que les activités agricoles dépendent du financement et étant donné que c’est cette question qui limite aussi notre agriculture ; je pense que s’il y’a des partenaires qui sont prêts à nous accompagner ainsi que les producteurs, il n’y a pas de raison qu’ils restent en arrière-plan. C’est une opportunité à saisir et je pense que c’est ce qui peut les permettre d’améliorer leur production et rentabiliser leurs activités de production », a précisé le directeur régional en charge de l’agriculture.

Avant d’ajouter : « nous attendons que l’accompagnement de ce projet puisse être une réalité sur le terrain. Que les outils du programme Agri+ soient disponibles au niveau des institutions de financement, pouvant accompagner les OPA à pouvoir contracter des fonds nécessaires pour la collecte et la commercialisation des céréales à travers des activités de warrantage ».

Romuald Dofini
Lefaso.net

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